Mine anti-personnel de l’éducation nationale – épisode 2

In "CE QUI SE PASSE", CHOSES VUES, MIND STORM, PROPAGANDA, TRANSMISSION
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Note2be.comDans un grand élan de subite honnêteté, Stephane Cola se retire da la liste UMP (dont la figure de proue est Pierre Lellouche) candidate aux élections municipale pour le huitième arrondissement parisien. On admirera au passage l’allure un peu victimaire de ce retrait, puisque le jeune entrepreneur précise qu’en tant que candidat de neuvième rang, il pouvait espérer un poste de conseiller d’arrondissement. Nul doute que ce retrait va beaucoup lui coûter, en effet, et on espère tous qu’il trouvera ailleurs d’autres ressources.

Il précise aussi que le cofondateur de note2be.com, Anne-François de Lastic (qu’il semble convenir d’appeler, en fait, Anne-François de Lastic de Sieujac, marquis de Lastic, si on veut être complet), ne partage pas du tout ses opinions politiques, qu’il serait même de tendance gauchiste. Loin de nous l’idée de soumettre un tel patronyme à un déterminisme idéologique trop rigoureux, mais, quand même, ça sent le château en héritage, et les écoles privées (ce que confirme une petite virée sur les sites répertoriant le patrimoine chatelain français et une petite visite à copainsdavant). Bref, une univers de gauche, effectivement. Mais il semblerait que cette gauche là, on y ait déjà goûté, et qu’on ait trouvé son goût trop proche de celui d’un vieux caviar, glissant vers l’arrière goût de vieille moule et et les effluves d’algues délaissées par une marée trop abondamment hydrocarburée.

Peu importe à la limite que le marquis de Lastic soit de gauche, c’est à la limite son droit de se fantasmer ambidextre contrarié. Mais on doit alors constater que ses actes ne suivent pas ses beaux idéaux. Note2be.com est dans la droite ligne de ce que propose l’UMP pour l’éducation nationale. Tout en s’adressant théoriquement à tous les élèves, son coeur de cible est bien évidemment l’élève type du lycée public tel qu’on peut l’imaginer, et tel qu’il existe effectivement; précisément cette école dont on peut juger, quand on a le front bas et la pensée calculatoire, qu’elle est coûteuse, et ce à divers titres : d’abord parce qu’elle pèse sur les finances de l’Etat, contraignant en partie ce fameux « pouvoir » d’achat tant attendu; ensuite parce que chaque élève issu des classes moyennes qui est inscrit dans le public est un client de moins pour l’école privée, dont il est peut être bon de rappeler qu’elle se situe avant tout dans le secteur marchand, qu’elle réalise des bénéfices, qu’elle finance des personnes privées, comme une clinique en somme. En terme strictement comptable, on peut considérer que l’école publique fait une concurrence déloyale à l’école privée, et qu’il est souhaitable pour ceux qui y ont intérêt, que l’offre publique soit la plus dégradée possible (et il en va de même pour la santé, lisez les articles de Pelloux dans Charlie Hebdo, vous serez édifié). Croyez vous vraiment que ceux qui ont de tels intérêts qu’ils ne mettraient pas en oeuvre les moyens nécessaires à un tel projet ?

Bref, Stéphane Cola renonce à être élu. Etant donné la manière dont il accepte de gagner de l’argent et la démagogie dont il est capable, il est probable que Paris n’y perde pas grand chose. Reste que la satisfaction n’est toujours pas totale, car demeurent deux obstacles dont on peut difficilement imaginer qu’ils soient abattus : le premier est la ligne directrice de l’UMP, dont on a là un bel exemplaire. Peu importe finalement que ce site soit une émanation consciente de ce parti; il dit tout haut ce que ses dirigeants, militants et électeurs pensent tout bas pour les uns, et ce qu’ils sont prêts à accepter pour les autres. Le second est le site lui même, qui continue à être une cours de récréation perverse. Entendons nous bien : que les élèves balancent sur les profs, c’est dans l’ordre des choses. Il paraît naturel que, exerçant une autorité sur les élèves, les profs soient, une fois loin de ceux ci, caricaturés, moqués, imités, ridiculisés dans des discussions parfois au bord de l’irrespect. Ce qui l’est moins, c’est que des adultes viennent les exciter à le faire. Ca, c’est ce qu’on peut appeler, de la part d’un adulte, un comportement pervers (et, d’ailleurs, ça laisse songeur sur le type de rapport qu’un adulte pareil pense devoir installer avec des enfants et des jeunes, quand il fait tout pour se mettre à leur niveau, et non pour les hisser au sien. Forcément, c’est plus facile à faire que ce que tentent de réaliser, au quotidien et sur le terrain, les enseignants). Le site existe donc toujours, il semble avoir un bon rendement. En terme de comm’, qu’il soit condamné ou pas importe peu, il aura sans doute réalisé ses objectifs. En particulier, il aura enfoncé un clou idéologique, en légitimant un rapport de pouvoir orienté des élèves vers les professeurs, là où précisément la responsabilité politique implique de préserver le rapport inverse.

En ce sens, la bataille est pour ainsi dire déjà perdue d’avance. Une fois que Stéphane Cola et le marquis de Lastic ont lancé leur petite mine anti-personnel de l’éducation nationale, les dégâts sont faits. Le président du même parti peut les jours suivants faire de belles tirades sur la mission sacrée du professeur des écoles, maillon nécessaire de civilité. Peu importe, il restera toujours des écoles privées dans lesquelles ceux pour qui cette civilité est importante pourront venir l’apprendre, contre rétribution évidemment.

La seule chose qu’on puisse faire, c’est tirer notre chapeau au binôme supposément apolitique (mais quel projet de ce type peut vraiment prétendre l’être ?). Mais on peut le faire bruyamment, et le couvrir d’un feu médiatique aussi nourri que celui sous lequel il attaque les enseignants eux mêmes. Ensuite, élèves, parents d’élèves et politiques pourront simplement choisir leur camp. Il est probable que dans les luttes telles qu’elles se font désormais, ce soit de plus en plus selon ces modalités qu’il faudra apprendre à se battre.

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