flesh

In MIND STORM
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https://www.youtube.com/watch?v=m9aWPlKEnDI

Evidemment, proposer un tel court métrage après avoir fait référence à Bresson peut paraître un peu paradoxal. Cependant, comme j’avais extrait des images de ce film pour illustrer l’article précédent, il ne paraissait pas complètement absurde de le proposer en entier, et ce d’autant plus que dans sa singularité, il n’est pas dénué d’intérêt.

En effet, presque uniquement constitué d’images de synthèse, il nous donne à revoir des images qui, au premier abord, nous sont familières (pour des raisons qu’on a déjà évoquées), sans pour autant consister en une simple redite de l’évènement collectif auquel fait référence le film. Dès lors, le film se place sur un autre axe que celui du cinématographe, il appartient à un genre encore balbutiant (enfin… ce sont quand même des balbutiements qui durent depuis Tron !) qui ne peut sans doute pas être jugé selon les mêmes critères que ce qu’on appelle classiquement « le cinéma », même si les productions des grands studios s’ingénient bien évidemment à brouiller les pistes et à ne surtout pas distinguer ce qui relève des deux ordres, faisant comme si le numérique n’était qu’une autre manière de « produire » des films.

Edouard Sallier bâtit donc ici un univers attaqué par les avions missiles. Cet univers est moins une copie d’une ville réelle que de la ville telle qu’on la fantasme : lieu du plaisir sacralisé, empire de la jouissance, sous toutes ses formes. Ridley Scott en avait eu le pressentiment, lorsqu’il faisait surplomber la ville de Blade Runner d’immenses figures de geishas publicitaires, hautes comme des buildings, accompagnant en video les déplacements des citadins, (quelle que soit l’altitude à laquelle s’effectuent ces déplacements), mais aussi leurs rêves. Ici, ce sont tout autant ces figures fantasmatiques qui sont visées par les missiles que les tours dont elles ne sont que les supports, ou plutôt l’écran.

Sans aucune autre explication que le carton d’introduction, le film peut paraître confus sur le fond : condamnation de l’occident jouisseur ? Peu probable. Si c’était le cas, le court métrage serait peu intéressant. Il semble plutôt qu’il s’agisse d’une mise en scène de notre rapport à l’image. Le rendu très lisse du film le rend plaisant. Ainsi permet il de se complaire dans la pulsion scopique. Cependant, la destruction des tours-écrans libère des séquences, très courtes mais repérables d’images (véritablement filmées, celles-ci) que nous pouvons tous reconnaître : Abou Ghraib, l’enfant vietnamienne courant nue devant les flammes du napalm, le Ku Klux Klan aparaissent furtivement, comme si les buildings avaient renfermé quelque chose que l’érotisme lassif dont elles étaient la toile de projection cachait jusque là efficacement.

On peut donc lire le film à deux niveaux : ou bien la mise en scène de la haine que peut provoquer une « certaine tendance » de notre civilisation à placer en tout en haut de ses ambitions la satisfaction perpétuelle d’un désir qui serait soigneusement normalisé dans des codes qui deviendrait d’autant plus normaux qu’ils seraient normalisés par le « marché » (et nul doute que si il ne s’agit pas de remettre en question notre civilisation, placer ainsi la destruction des tours sur le terrain du plaisir nous permet de nous poser de nouveau ces questions dont on a appris à considérer que la réponse était évidente : que vaut notre plaisir, n’y a t-il rien qui vaille plus que lui ?) ou bien la mise en scène de notre rapport à l’image, qu’elle soit une image de type documentaire, ou qu’elle soit la mise en image technique de notre propre psychisme. Dans cette seconde couche de sens, on pourrait alors rapprocher Flesh du clip qu’avait proposé Chris Korda, sur le même point de départ, mais avec d’autres moyens : I like to watch mixait en effet les images télévisées de l’attaque du wtc avec des séquences issues de films pornographiques ainsi que de retransmissions « d’évènements » sportifs. Tout en proposant un rendu très différent de celui de Salier, Korda travaillait finalement la même matière, de manière simplemet plus provocante, jouant sur un autre registre de visionage, ou s’adressant à un autre type de spectateur.

« L’empire dévoile tout mais ne voit rien
Ses ennemis idéalisent tout mais ne tolèrent rien
l’Orgasme terrestre des putains cathodiques pour les uns
L’orgasme éternel des 70 vierges paradisiaques pour les autres
Et si la chair était seule au monde ?
« 

C’est sur ces mots que s’ouvre le film, juste avant l’attaque. Dans l’abstraction des formes finales, c’est aussi dans la chair que le film se clôt, mais dans une chair désormais à vif, débarrassée des écrans sur lesquels sa conception consensuelle, politiquement et économiquement arrangeante avait réussi à la plaquer.

Un peu comme un nouveau mythe.

Detail technique : Pour que l’image du film apparaisse, il semble nécessaire de cliquer sur le bouton le passant en plein écran, vous pourrez ensuite revenir en mode réduit pour avoir une définition plus satisfaisante.

26 Comments

  1. Bonsoir, on pourrait peut être lire aussi dans ces images (du moins est-ce ce que moi ai l’impression d’y voir) une volonté de briser notre doucereuse et lénifiante inconscience, de nous arracher à notre complaisance (cela paraîtra, en fait, parfaitement évident pour tout le monde ! et j’ai honte de proposer cette « interprétation », bien malgré moi, comme si elle avait l’air d’une alternative (et d’ailleurs une alternative à quoi ?!)).

    Mes connaissances sont basiques, primaires, incomplètes et fausses sans doute pour la plus large part (je travaille depuis peu, m’en étant tellement rendu compte, à corriger un peu tout ça, mais mes « tentatives » seraient comparables aux pas que chercherait à faire un nouveau-né dans un monde qui largement a des dimensions incommensurablement supérieures aux siennes)mais on pourrait peut être voir là une sorte de mise en image d’un processus de notre psyché, processus tel que Freud le décrit (ou l’a simplement théorisé), je veux dire le retour du refoulé, le passage de l’inconscient au conscient (pour cacher à nous mêmes les horreurs de ce monde et les horreurs commises en ce monde (et sans doute aussi un peu notre responsabilité vis-à-vis d’elles), nous le masquons, nous le voilons, nous le refoulons, et en l’occurence, pour ce faire, nous nous auto-injectons une dose bien élevée de dopamine bon marché pour fuir l’envers du décor (et là on ne peut que penser à Pascal, pour qui le divertissement, le loisir, n’est qu’une forme d’absence à soi que l’on rechercherait avidement afin de taire, d’étouffer dans l’oeuf, toute étincelle de conscience, qui est peut être, essentiellement, souffrance).

    De même, j’ai l’impression que ce court-métrage illustre ce que tu disais dans ton post précédent: « Amateur ou pas, on passait ainsi 24h en boucle, quelques heures sans fin, en éphémère éternel retour. Des visages, des figures attendait, encore emballé dans son cellophane, que la nausée soit suffisamment installée, pour que la raison reprenne le dessus » en lançant à toute allure ses avions missiles sur notre inquiétante, étrange, blessante et indifférente quiétude, dans le domaine sacré de nos illusions cristallines (quoi !? on entreprendrait la destruction massive et le bombardement systématique de la Grotte dans laquelle Platon a raison d’installer la plupart d’entre nous ? impensable… d’ailleurs le court-métrage se termine sur une nouvelle édification des mêmes tours, qui certes semblent ne pas être sorties indemnes de l’attaque, notamment par leur nouvelle configuration, et par le fait qu’elles sont désormais au centre d’un monde dévasté, « post-apocalyptique » pourrait-on dire, mais désormais elles font bloc et brillent plus que jamais; comme quoi, même mise à mal, la soif de se repaître de plaisante tranquillité, de s’enfoncer lentement, doucement, mais sûrement, dans le sommeil comme dans un puit noir et sans fond, est probablement constitutive de notre être spontané ou premier (voire même second)car ne faut-il pas se faire violence pour s’opposer à notre nature (si elle est bien, ce que je crois, de vouloir se reposer sur ses lauriers, « point trop n’en faut » ou « inutile d’aller plus loin, on est pas bien là ? » comme suggérerait l’autre…)? c’est en tout cas en étant contre-nature qu’on séprouve le plus comme être vivant, en tout cas existant, je crois).

    Arf ! je m’arrête là car je crois que ce commentaire est bigrement trop long, et qu’il ennuiera du coup bien des personnes qui s’aventureront à le lire (et qui auraient raison de s’arrêter en chemin), pardon à tous ceux-là ! (si c’est mieux ainsi, je veillerai à faire plus court la prochaine fois, mais, à cause de ma faiblesse, je ne garantis rien !). Merci à Youri d’être aussi intéressant, pertinent et bouleversant (et de nous proposer une réflexion et tant d’éléments qui imprimeront un nouveau mouvement à notre conscience), et cela presque à chacun de vos posts (c’est de ce point de vue une réussite quasi-totale), je ne peux qu’apprécier de loin l’ampleur de vue et la lucidité grâcieuse et acrobatique du maître 🙂

    bonne soirée !

  2. Cher Lulu,

    il va falloir arrêter la modestie.

    Il va aussi falloir cesser d’utiliser l’appellation « Maître », comme tu peux le constater chez les autres commentateurs, il n’y a pas sur ce point unanimité, et ça me semble plutôt bien comme ça !

    Et surtout, il ne me semble pas que tu ais besoin d’un quelconque maître, tes interventions en témoignent. Quant au stock de connaissances, ce n’est pas un concours et il est hors de question de l’évaluer sur la base des connaissances des autres. A ce jeu là, on se retrouve vite pris dans des courses à l’érudition que je trouve assez insensées. Il faut juste disposer des connaissances nécessaires pour traiter les problèmes que l’on se pose. Et les problèmes sont bien plus importants que les connaissances elles memes,et ce d’autant plus que celles ci peuvent vite devenir un dogme définitif empêchant tout approche d’un discours différent. Et puis, bon, faut arrêter : tu es mille fois plus bosseur que moi, qui sombre assez volontiers dans un joyeux dispersement et un non moins enthousiaste diletantisme plus ou moins festif. Et je suis sûr que sur le détail de certaines théories, tu m’en remontrerais déjà aisément.

    Enfin, sur le fond de ce court métrage, il me semble aussi que la couverture de fausse sensualité que nous avons tendu sur notre propre manière de vivre (j’arrête là de parler de civilisation, parce que je veux croire que, justement, notre civilisation ne s’identifie pas à cela) est un écran qui nous empêche d’aller au delà, de nous déséquilibrer suffisamment pour nous mettre en mouvement. Ensuite, je ne suis pas sûr que Freud permette d’expliquer cela, parce que de plus en plus, il me paraît probable que cette toile est tendue de manière organisée, pour des raisons aussi politiques (au sens de la maîtrise des individus, tant moralement que corporellement) qu’économiques (ce qui aujourd’hui semble revenir de plus en plus au même). A strictement parler, je ne suis pas sûr que le désir véritable, si il était libéré, produirait un quelconque comportement de consommation. Il me semble que nous sommes orientés vers autre chose. Et peut être, d’ailleurs, que la conscience de cela commence suffisamment à apparaître pour que le monde de la production de biens et services prépare le terrain, en ne promettant plus la jouissance, ni le bonheur (à force, on s’est quand même aperçu que la consommation ne procure ni l’une, ni l’autre), mais la sécurité. Et pour que cela fonctionne, il ne faut justement plus promettre aux peuples le bonheur, mais au contraire les pires des catastophes. Et ça me semble être précisément l’orientation que prend désormais la manière dont on nous gouverne. Le court métrage ne montre évidemment pas cela, mais sans doute qu’une nouvelle toile est en train d’être tendue dans notre ciel, et pour le coup, les avions noirs se jetant sur nos beaux centre villes me semblent bien faire partie du nouveau décor.

    (héhé, ça me vient comme ça, au fil du clavier, cette idée, mais elle me paraît assez intellectuellement excitante, merci de l’avoir suscitée par ton commentaire !)

    Heureux de t’avoir lu en tous cas !!

  3. Juste ciel ! il me semble avoir été, pourtant caché derrière mon pseudonyme « lulu » dont je croyais la « défense » ou le mur efficace(un peu comme clark kent croyait dans le pouvoir de ses lunettes pour cacher aux hommes son identité de superman), découvert ou plutôt reconnu sans une parcelle d’hésitation… comme quoi, un peu comme les planètes qui sont dotées d’une atmosphère le sont d’une atmosphère spécifique, on doit répandre ou produire autour de soi une identité irréductible et reconnaissable, repérable en toutes circonstances, pour celui qui a les nez fin et qui a déjà eu l’occasion d’avoir à respirer un peu de cette « atmosphère » là.

    Oui-da, tu as raison, je n’aurai pas dû user de l’appellation « maître » (de quel droit plaçons nous quelqu’un, qui n’a rien demandé ni désiré de tel, en tant que « maître », sous-entendu, parmi des esclaves, ou en tout cas des personnes qui se croiraient d’une « nature » plus faible ou inférieure ?), mais ce n’était que pour souligner mon admiration devant tant, de ce qui est pour moi, de force de réflexion, et de capacité à faire flêche de tout bois pour traiter d’un problème, devant cette (ce qui est encore pour moi et pour moi seul) prodigieuse « association-libre », pour opérer un petit retour vers Freud. Ok, je suis désolé, et je te remercie de t’évertuer à rappeler que nous ne sommes que des hommes (« sic transit gloria mundi »), aussi avancés, ou « reculés », que nous soyons sur le « terrain » des connaissances. Mais je tiens ici à te rassurer sur ces points.

    Dieu merci, je comprends ton inquiétude, et je m’accorde tout à fait à ton jugement lorsque tu déclares « insensées » ces « courses à l’érudition »: mon souhait n’est pas de compiler et d’accumuler une incroyable ou exagérée (par rapport aux problèmes que l’on se pose, et je suis d’accord avec toi pour dire que le lot de connaissances accumulé doit être, au minimum et pas nécessairement plus, en adéquation avec eux)quantité de diverses connaissances, et encore moins dans le but de tenter de prendre la tête de la file et de creuser un maximum d’écart entre moi et ceux qui me « suivraient »(et donc diminuer celui qui me sépare de ceux que je poursuis). Lorsque je parlais d’un mini-« éveil » dans le commentaire plus haut, je faisais un peu allusion à ça, c’est à dire à un sursaut d’humilité, car quoi que l’on fasse, il semble que notre ignorance est à jamais (et c’est tant mieux)extrêmement vaste et définitive (pas au sens des sceptiques, qui considéreraient toute « avancée » dans une prétendue connaissance absolument illusoire, mais plutôt au sens où Bachelard l’éclaire dans « l’esprit scientifique » (je ne sais plus tellement le titre alors je ne dis que ça), c’est à dire que, comme tu le sais, quoi que tu en dises :), mieux que moi, on a beau mettre en lumière certains phénomènes, cette mise en lumière amène à la perception d’autres phénomènes (zones d’ombre de la connaissance) qui restent à explorer et à éclairer, et ce, apparemment, continuellement).

    Je ne sais pas si je suis plus bosseur que toi: à ta manière, rien de ce que tu fais ne semble se perdre et ne servir à rien, moi, j’oublie facilement et, qui plus est, je suis tout aussi facilement la proie de mes émotions, ce qui a pour effet direct de me « divertir » (un peu au sens pascalien du terme) et le « retour » peut être souvent particulièrement long et laborieux (je suis donc, comme tu vois et pour mon plus grand malheur et source d’énervement, aisément déséquilibré, peut être pas, quoique si, peut être un peu, et même beaucoup, par la fausse couverture de sensualité dont tu parles dans ta réponse, et en tout cas si ce n’est pas spécifiquement par ça, c’est en tout cas par autre chose).

    En tout cas je suis content que mon commentaire ait suscité encore une de tes idées fertiles, qui, vois tu, comme un « eventus », est apparu soudainement dans ta conscience (et s’éclaircissait sans doute au fûr et à mesure que tes doigts glissaient sur le clavier), grâce peut être à un petit coup de pouce de ma part, mais qui au fond, comme tu le disais, « porte en lui tout le passé comme un matériau qu’il achève de sculpter ». Ca rejoint une idée que Zweig exprime dans une lettre adressée à Freud justement (voilà pourquoi le parallèle avec la psychanalyse m’était venu, j’étais en pleine lecture de la correspondance Zweig-Freud ! :))que j’ai lue hier, c’est que « les idées n’ont pas de patrie », et qu’au fond « je n’est pas un », pour reprendre le titre d’un article du n°13 (je crois) de Philosophie magazine (merci d’ailleurs, si j’en suis devenu lecteur, c’est grâce à toi :)) et que donc nous sommes, nous et « nos » idées, le produit d’une multitude d’intéractions.

    Pour finir, je me contenterai d’une citation (décidément !), qui me permettrait selon moi de répondre complètement (ou presque) de l’admiration qu’il peut m’arriver d’éprouver envers toi, et donc du reproche que tu aurais à m’en faire, mais je laisse la place à l’intéressante parole de Cornélius Castoriadis:

    « Parce que la vérité n’est pas correspondance, n’est pas adéquation, c’est l’effort constant de briser la clôture dans laquelle nous sommes et de penser autre chose et de penser non plus quantitativement, mais plus profondément, de penser mieux. C’est pour cela qu’il y a des grandes philosophies qui sont vraies, même si elles sont fausses, et d’autres philosophies qui peuvent être correctes et qui n’ont aucun intérêt. » (tiré d’un livre minuscule où est retranscrit la conversation de Castoriadis, interrogé par quelqu’un d’autre de connu, mais dont j’ai oublié le nom)

    Pour moi (tout de même, il devrait être possible, et même recommandé, de remercier son ancien professeur ! de même qu’il devrait être autorisé d’avoir pour lui quelques restes de reconnaissance et d’admiration (je sais que tu ne dis pas le contraire)) tu as été un peu celui qui m’a mis sur la voie pour deviner tout ça, et voilà pourquoi il m’arrive encore de te regarder avec des yeux pleins de vénération 🙂 (mais qui n’a pas pour but de faire de toi une idôle figée dans sa perfection!).

    Ca y est j’ai fini par finir, merci de ta patience, heureux de t’avoir lu également au fait, à bientôt donc ! 🙂 (j’aime pas trop cette « émoticone », je trouve qu’elle donne un sourire crispé, un peu trop arrogant (le mot « californien » me vient à l’esprit, allez savoir de quel préjugé je souffre envers eux…)ou plutôt peut être un peu trop joyeux, « mon » sourire serait peut être un petit peu plus discret, mais bon ça n’a aucune espèce d’importance et ça rallonge le texte! (puis désolé pour ceux qui l’aiment bien))

  4. Hmmm… il me semble que ce n’est pas tout à fait la première fois que je te mets un peu à jour !

    Bon, acceptons l’admiration, même si elle me fait gonfler les chevilles, et que je prefere les relations d’egal à egal (relation à laquelle il semblerait qu’il soit temps de parvenir !)

    La preuve que tu suis ton propre chemin, et de manière autonome : tu me parles de cette correspondance Zweig/Freud, et je découvre son existence même en te lisant (et autant dire que ça m’intrigue déjà énormément, et que je me dis que ça doit être diablement intéressant de lire ce que ces deux avaient à se dire). Idem pour la citation de Castoriadis, qui est bien goûteuse, et qui va je le sens me contraindre à fouiller un peu pour la trouver dans son environnement naturel.

    Quant à savoir si il faut être reconnaissant à ses professeurs, il est probable que ça fasse partie de la bienséance, mais je pense qu’on est un peu au delà des simples convenances. D’autre part, le meilleur remerciement consiste tout simplement à faire quelque chose de l’enseignement reçu, ce que tu fais. Nous sommes donc d’ores et déjà quites ! Par contre, si l’admiration me gène déjà un peu, tu peux imaginer quel effet peut avoir sur moi la vénération… … 😀

    Enfin, l’impatience se manifeste surtout quand je n’ai pas de tes nouvelles, pas quand je te lis !

  5. Cher Lulu,

    Je n’ai pas le plaisir de vous connaître, mais j’ai eu celui de vous lire. Deux précisions concernant le jkrsb :

    – Vous aurez compris que la vénération le vénère, donc comme le plus très jeune lion dort encore avec ses dents (et c’est un dinosaure qui vous parle d’expérience), arrêtez de respecter ce vieux félin,

    – Quant à le traiter de maître, il me semble que vous commettez une faute d’orthographe (à laquelle jkrsb, enfin Youri Kane sait que je suis très attaché, au risque de l’archaïsme) et que c’est à un mètre quatre vingt cinq, voire cube que vous vous adressez.

    Enfin une dernière précision : fait-il toujours pleurer vos camarades filles ? C’était sa marque de fabrique…

  6. Bonjour !

    Enfin je trouve un moment propice à vous répondre ! (et mine de rien, que ce soit pour mon heur ou mon malheur, ces quelques « temps libres » se raréfient comme peau de chagrin en ce moment!) mais je commence sans plus tarder:

    Sachez, Michel, que je suis très étonné d’apprendre que mon ancien professeur avait pour « marque de fabrique » celle de faire pleurer (régulièrement ?) certaines de ses ex-élèves filles, en tout cas je peux vous assurer (quoique je ne suis pas au courant de tout ce qui a bien pu se passer) que ce ne fut, à priori donc, pas le cas pendant toute une année, celle où j’étais son élève. Mais m’est avis que ces donzelles s’étaient un peu trop amusées à provoquer le lion, et que celui-là a su pernicieusement planter les crocs là où la douleur se ferait le mieux sentir 🙂

    Je vous remercie enfin de m’avoir fait remarquer mon erreur d’orthographe, et, un peu plus sérieusement, je comprends que vous y soyez très attaché, et je ne considère pas cela comme un archaïsme, à vrai dire j’avoue que je ne sais pas quels sont les motifs qui peuvent motiver une troupe d’experts à opérer sans crier gare un changement brusque dans l’écriture de certains mots, et je comprends qu’on puisse se trouver en quelque sorte désemparé quand on apprend que, du jour au lendemain (ce qui n’est pas tout à fait vrai puisque ce genre d’opération sur le langage, du moins me semble-t-il, ne fait pas l’objet d’un article dans la presse, et qu’il faut donc attendre qu’on nous le fasse remarquer au fil du hasard), on commet une faute en continuant de parler « d’événement » plutôt que « d’évènement »…
    En fait je me demande si, le langage étant tout de même un peu une propriété commune, il est normal qu’on laisse le soin à seulement quelques uns de le modifier (bon là j’exagère, le remplacement d’un « é » par un « è » n’a rien de dramatique, mais je trouve que tout de même, et c’est tout ce que je demande, on devrait nous prévenir au moins du changement, puis aussi pourquoi pas des raisons de ce changement).

    Enfin je dois dire que, quoi qu’il arrive (même si il venait à me faire pleurer également) je ne pourrai pas cesser de respecter ce vieux félin: j’ai toujours eu un faible pour eux, et celui là m’a trop apporté pour que je puisse, d’un coup de baguette, l’oublier 🙂

    Youri ! (je me presse j’ai cours dans quelques minutes), si tu souhaites retrouver le livre dans lequel j’ai pris la citation de Castoriadis, un dernier indice: il me semble que c’est le petit opuscule qui retranscrit son interview par Daniel Mermet (si ce nom s’écrit comme ça).

    Je file au plus vite (je croyais que j’aurai suffisamment de temps!), à beintôt ! 🙂

  7. J’ai beau chercher, je ne vois pas où se trouve cette faute d’orthographe.

    Sinon, sur la question des pleurs, je me demande si ça ne constituerait pas un peu une vision légèrement réductrice de ma mission ! Les larmes peuvent constituer parfois un moyen, ou un dégât collatéral, mais je n’en fais pas (du moins pas encore) un but en soi !

    Pour ce qui est de demander à Pujadas d’informer la population française des changements orthographiques, je me dis que ça serait intéressant à la condition que la sus-mentionnée population soit au courant de la précédente orthographe, ce qui me semble être rarement le cas. Dès lors, il est probable que ce genre d’annonce puisse provoquer des émois un peu artificiels. Mais bon, je ne vais pas faire le malin, dans la mesure où je ne puis pas tout à fait revendiquer une orthographe tout à fait sans reproche.

    Pour finir, en effet, ce doit bien être l’entretien avec Daniel Mermet dans lequel Castoriadis écrit ce genre de choses.

    Je reviendrai sur la vénération, dès que j’aurai plus de temps.

  8. Bonjour,

    il est vrai que j’avais également pensé à ça, mais façe au peu de temps que j’avais alors devant moi, je n’en avais pas souffler mot: peut être que le cours de philosophie que tu leur avais dispensé, et dont elles étaient reparti en pleurant, contenait des éléments qui ont sus les bouleverser honnêtement, dissiper pourquoi pas quelques idées fausses dont la perte nous est toujours un soulagement qui peut aller, du moins moi m’est-ce arrivé et peut être était-ce le cas de ces filles aussi, jusqu’aux larmes. Dans ce cas j’ai plutôt tendance à dire que ta mission aurait remporté une bataille de plus.

    Enfin je trouve que tu as encore une fois raison: il se peut bien que la plupart des gens se fichent pas mal de savoir ce que les messieurs de l’académie française traficotent avec l’orthographe de certains mots, ne serait-ce que parce que leur connaissance de l’ancienne n’était pas très assurée; mais c’est là ce que je trouve dommage car si tout le monde accordait davantage de valeur à la langue telle qu’elle s’écrit (je veux dire surtout ceux qui en ont rien à faire), j’ai l’impression, je n’oserai pas encore m’aventurer trop à expliquer pourquoi, que cela ne pourrait être que bénéfique et positif.
    Et je suis loin de posséder aussi une orthographe impeccable et parfaite en toute situation.

    A bientôt (il va falloir que je m’attarde à écouter ce qu’il y a dans ton casque 🙂 bisous!)

  9. « On peut dire que le grand homme est justement l’autorité pour l’amour de laquelle on accomplit l’action, et comme le grand homme lui-même exerce une action grâce à sa ressemblance avec le père, on ne doit pas s’étonner que dans la psychologie des masses il lui revienne de jouer le rôle du surmoi. » (Freud – L’homme Moïse et la religion monothéiste)

    Allons bon, me voilà au point de citer Freud : je suis tombé bien bas !

  10. hmmm….

    j’ignore à quelle(s) fin(s) vous avez tenu à citer précisément cette phrase: si la question est de savoir si youri a pu être, comme beaucoup d’hommes peuvent être, un « homme moïse » pour certains, j’admet assez volontiers cette assertion et cette image comme valables (à cela près que moïse était un prophète et donc un homme de dieu, et que youri est tout le contraire, c’est à dire un philosophe (quoique on pourrait me rétorquer qu’il a existé et qu’il existe nombre de philosophes de confession catholique par exemple, de Saint Augustin à Jean Guitton (pour en citer deux connus et qui font parti des quelques rares exemples que je connais), et que par là dieu et la philosophie peuvent faire bon ménage, sauf que lorsque ils cohabitent, il me semble que le philosophe doit, à un moment ou à un autre, abdiquer sa raison, c’est à dire s’effacer, au profit de la foi et de l’homme de dieu, qui n’a plus à douter dès lors de grand chose, mais la question mériterait examen, et je ne suis en rien habilité à, et capable de, le faire)); de même, il est possible dans ces conditions que cet homme puisse en arriver à constituer un surmoi, un assemblage de valeurs emblématiques auxquelles on se réfère durablement pour trouver des guides à notre action; et enfin on pourrait même dire que cet homme pourrait être une sorte de père spirituel, en cela qu’il aurait accouché d’une âme et donné un enseignement à cette dernière… mais pour la rendre et la laisser autonome.

    donc, en revanche, de là à dire que l’action est alors accomplit pour l’amour de l’autorité de cet homme, c’est lui donner une dimension qu’il n’a pas, c’est à dire précisément celle du prophète, guide des peuples, directement inspiré par, et donc nimbé de l’autorité de, dieu lui même. Or le type « d’homme moïse » auquel nous faisions allusion plus haut n’est qu’un homme, on peut, pour l’amour d’un ermite, entreprendre à son tour une vie d’ermite, mais l’autorité dont cet homme a su faire preuve et dont il est ici question n’a rien de divine, elle est au contraire toute humaine et, par conséquent, cet amour débouche sur plus de marge de manoeuvre, pour moi, sur la liberté elle même (donc sur l’absence de père et/ou de surmoi, au profit d’une source d’inspiration qui n’a pas pour visée d’imposer des limites mais d’ouvrir des possibles).

    Je m’arrête ici, je crois n’avoir fait que décrire très mal ce que j’avais l’impression qu’il me fallait dire, au point que j’hésite même d’oser valider ce commentaire, mais je préfère encore être exposé aux critiques, qui aident à reformuler la pensée, et qui peuvent contribuer parfois à se rendre plus exigeant envers soi-même à l’avenir (donc, jettons nous !).

  11. Ni Dieu, ni mètre (cube) !

    Bon, là c’est pire que du Lacan : j’ai presque honte !

  12. Voila, mes élèves peuvent écrire qu’à un moment donné, le philosophe doit céder sa place à l’homme de foi, et de citer Jean Guitton dans la foulée !

    Si ça, ce n’est pas la preuve qu’il n’y a ni maître, ni disciple!! Il n’y a que des trajectoires qui se téléscopent, et « dieu » seul sait où tout cela peut mener.

    Mais bon, puisqu’on en est à convoquer Lacan, tout devient possible dans cete page !!

  13. Parbleu ! sacrebleu ! fichtre ! diantre ! etc etc etc…. il me faudrait écrire plusieurs pages de jurons, ou d’exclamations interloquées de surprise, pour exprimer mon étonnement !

    Se peut-il que j’ai été si mauvais, si confus et bête (ce qui est tout à fait possible ! car je conviens avoir tenu un discours, plus haut, très « approximatif », du moins nullement rigoureux !), qu’il est devenu possible d’interpréter dans mon message que je trouvais souhaitable que le philosophe laissat de coté son rôle pour prendre soutane et prêcher que le monde fût créer en six jours et que son « magnifique architecte » se reposat au septième (repos, ou congé, dont il semblerait d’ailleurs qu’il ne soit pas encore sorti…) ? à moins que ce soit moi qui suis victime d’une mauvaise compréhension de ce que tu as écris… mais si ce n’est pas le cas, alors je tiens à rattraper le coup, et à clarifier un peu ce que je tenais à dire !

    Non, pour moi, le philosophe ne doit pas céder, à un moment ou à un autre, sa place et passer le témoin à l’homme de foi: je voulais juste mettre en exergue la distinction immense qu’il y a entre les deux: un type d’homme qui « sait qu’il ne sait pas », et qui n’a pas de plus tendance à accorder toute confiance à ce qu’on lui assure ou présente comme étant la vérité (et donc de ne pas en présenter non plus à son tour, une), et un autre qui crois (c’est le cas de le dire) savoir, du moins qui crois avoir des réponses fiables, sur de nombreuses questions… pour moi le second peut peu ou prou dormir en paix (et considérer la philosophie comme une étape intermédiaire, transitoire (inessentielle donc), nécessaire peut être pour mener à bien quelque raisonnement) et le premier a de fortes chances de ne pas se satisfaire des lumières de l’homme écclésiastique, et de les considérer à tout le moins avec méfiance (ce sont des dogmes ! et je ne suis pas sûr que quelqu’un d’authentiquement philosophe aime à y être écroué).

    mais bon je ne vais pas m’étaler plus avant dans mes malheureux verbiages, car j’ai l’impression qu’ils ont un petit peu apportés le chaos, et que du coup cette page est devenue une sorte d’étrange foire où tout est possible, et que de cela, donc, j’en suis le seul responsable, je présente d’ailleurs pour cela mes plus humbles excuses.

    bonne continuation !

  14. Jean Guitton, c’est un peu cheap en effet. Je suggère un Jacques Maritain à la place. Ca n’a pas plus d’intérêt, mais ça le fait plus !

  15. Sur le coup, j’avais lu un peu vite « jacques martin », ce qui m’avait plongé dans un mélange d’enthousiasme et de circonspection.

    Quant à Jean Guitton, je retiens surtout le livre en partenariat avec les jumeaux venus d’outrespace.

    Mais bon, pour aller un peu dans le sens de Lulu sans se noyer dans le bénitier, je lisais le livre d’andre gorz « lettre à D. » et je trouvais qu’on avait là un exemple de philosophe qui, à un moment, se trouve confronté à quelque chose de plus grand que sa pensée et ne peut que s’incliner. Dès lors, je ne vois pas de vraie raison de s’excuser, surtout humblement !

    Allons plutot lire Jacques Martin.

  16. Du coup je suis parti lire à la fnac un matin « Lettre à D. » (alors que ta dernière recommandation était pourtant « Allons plutot lire Jacques Martin », et d’ailleurs je ne me suis pas vraiment encore informé sur cet homme, mais j’imagine que ce n’est pas le célèbre présentateur télé qui, sauf erreur, je pense, n’a pas écrit d’ouvrage) et j’ai été frappé par cette histoire d’une vie (qui ne le serait pas ?) menée de front, en commun, façe aux nombreuses avanies qu’ils ont eu à subir, et ce dans l’assurance perpétuelle d’avoir pour soutien, jusqu’à la mort, l’autre.

    Il est vrai que l’on a là un bel exemple de deux personnes qui se sont trouvées, puis qui ne se sont plus quittées (séparation qui aurait été sans doute une épreuve fatale, pas nécessairement au sens propre, pour l’un comme pour l’autre, du moins en a-t-on l’impression).

    Et j’avais une question, penses tu que l’amour, tel que l’a éprouvé André Gorz et sa femme, et tel qu’il est défini par Aristophane (car plus je m’interroge, plus je considère (effet ricochet ?) avoir une conception de l’amour très semblable à la sienne), puisse être éprouvé pour plusieurs personnes à la fois ? Ma tendance naturelle de réponse à cette question tirerait d’emblée vers le non, mais que dire alors de cette vague de « polyamourosité », dont les couleurs sont portées et défendues par des personnes partageant (et n’hésitant pas à partager, avec ceux pour lesquels on éprouve un peu plus (un peu moins ?) qu’un attrait)leur couche avec plusieurs êtres (il n’y a pas, implicitement, à entendre de « en même temps »), qu’ils disent aimer autant, mais différemment, l’un que l’autre ? fétichisme ? illusion de l’amour ? rêve insensé voué à ne frôler que de loin l’essentiel sans jamais s’engager ? peut on encore parler, avec un soupçon de réalisme, « d’amour » dans ces conditions ?

    Bien sûr ces questions se posent à moi parce qu’elles me concernent d’un peu près en ce moment, et je suis partagé entre mes convictions, et un certain discours. Qu’en penses tu ? et vous, michel, y a-t-il là anguille sous roche (comme mes sens me le crient: « méfiance ! »)? Pardon d’apporter un peu d’élément personnel dans ce commentaire (mais je tenais à être honnête), j’espère que cela ne vous dissuadera en aucun sens de m’apporter vos lumières à ce sujet… je vous revaudrai la pareille ! 😉

  17. Cher Lulu,

    Houla ! Du jkrsb, farouche monogame, à ma modeste personne, non moins farouche libertin, il y aurait beaucoup à dire tant l’éventail est large. Mais je m’abstiendrai tant par discrétion que par pudeur : je ne parle jamais de cul ou seulement par dérision pour faire ce qu’on peut attendre de moi en certaines circonstances(je pense que le jkrsb acceptera de cautionner ces propos) ! Il faut du talent, singulièrement dans ce domaine, et j’en suis fort dépourvu.

    En revanche, j’ai trouvé il y a longtemps (gaspation, je présume que vous n’étiez pas né et même j’en suis certain) beaucoup de réponses à mes questions de jeune homme (mais oui je le fus) dans un ouvrage magnifique qui s’appelle « Fragments d’un discours amoureux » d’un certain Roland Barthes. Ma naïveté à l’époque était grande et il me fallut plusieurs années pour comprendre qui (ce « qui » pouvant être polymorphe, voire polysémique) était l’objet des assiduités de RB. Ce qui ne modifia que peu la lecture que j’avais faite de cet ouvrage que, malgré son grand intérêt, je devrais peut-être vous déconseiller, jeune amoureux amoureux innocent, tant il dit et décortique ce qui devrait être indicible.

    Je le rédécouvre à l’instant et presque miraculeusement parmi quelques milliers de livres : finalement les gens à qui je prête abondamment n’ont peut-être pas tant de talent de lecteur ni de goût puisque tous me l’ont rendu. L’édition en ma possession date de 1977 et semble être la première (je crois l’avoir lue dès sa sortie) : la distance m’empêche de vous le prêter. Compte tenu de l’organisation du livre (d’assez courts chapitres), une lecture à la FNAC me paraît très possible pourvu qu’elle soit faite en plusieurs épisodes. Elle est probablement salutaire puisqu’elle vous contraindra à la réflexion entre les différentes parties que vous lirez et dans ce domaine, ô combien personnel, elle ne peut qu’être salutaire et enrichissante.

    Encore faut-il que la FNAC ait cet ouvrage en rayon. Je crains qu’il ne soit passé de mode. O tempora, o mores !

  18. Merci, Michel, de vous être un instant penché sur mon problème, soyez certain que, même si de l’eau a coulé sous les ponts, je finirai par trouver ces « fragments » pour en faire une lecture assidue (je n’ai d’ailleurs jamais lu plus que quelques lignes de RB (et là on pourrait s’exclamer derechef, il est vrai, « autres temps, autres moeurs! »), ce sera là une bonne occasion d’aller à sa découverte, et de revoir peut être que certaines choses en effet ont la vie dure, de par ce qu’elles ont atteint des sommets en leur matière, mais voilà que je me sens sur une pente pouvant m’emmener promptement à manquer d’égard à ma promesse, et que je relâche déjà ma surveillance ! je devrai vraiment tourner sept fois ma langue en bouche avant de causer, pour n’en dire pas plus qu’il n’en faut (et ne point déraper comme je sais si bien y faire).

    Merci donc encore une fois, non pas seulement pour votre conseil de lecture, mais pour votre attention 🙂

  19. Que je sache, Barthes est loin d’être passé de mode : il demeure une idole des prepas littéraires, et il reste superbement ignoré des universités (ce qui est toujours plutôt bon signe). Et on trouve toutes ses oeuvres à la Fnac. Bon, peut etre pas toutes les Fnacs, mais on trouve ses livres.

    Et il a aussi préfacé le livre de Renaud Camus intitulé « Tricks », qui est une pièce intéressante à verser au chapitre de la réflexion sur les amours multiples.

    Et effectivement, il y a là de quoi méditer. Sans doute n’en a t-on jamais fini. On en reparlera un d’ces quatre.

  20. (a) Lulu : Je m’étonne de ton incapacité, ou de ta mauvaise volonté, jkrsb, papa d’Argos, à me fournir une réponse à la question sur la pluralité des amours. Toi, mon maître, plût à Zeus et aux Dieux que tu ne puisses me fournir une réponse. — jkrsb : Par le chien, tu t’en étonnes ? — Lulu : Eh bien, oui je m’en étonne. (b) jkrsb :Examinons, en cas de nous abuser de quelque façon, les raisons de mon silence. C’est que, de la même manière que si je répondais à ta question, je dévoilerais une partie de mon intimité, de la même manière en n’y répondant pas, je ne montre dans cet éphéméride que ce que j’y veux bien montrer et, (c) je réponds ainsi à la définition du blogue — Lulu : Certes, tu y réponds si tu m’indiques ce qu’est cette définition du blogue — jkrsb : Mais, mon compagnon, tu ne la connais pas cette définition ? — Lulu : Non, je ne la connais pas. — jkrsb : C’est de garder pour Alcibiade ce qu’il a à savoir et de n’exposer au Prytanée que ce qui n’a aucune importance pour Alcibiade et pour moi — (d) Lulu : Ainsi si mon regard est attiré par une pluralité d’Alcibiade, ou une pluralité d’êtres qui ne sont Alcibiade ni de près, ni de loin, je devrais multiplier les blogues ? jkrsb : Revenons si tu veux bien à la définition, du juste, du beau, de la sagesse, du bon, de la marmite, du médecin, du cordonnier, de la mouvette… (e) Lulu : Euh bon, je vais aller lire Jean Guitton à la FNAC…

  21. C’est rudement bien amené, tout ça 🙂 C’est peut être regardé d’un tout petit peu haut, mais il n’est pas impossible que le Michel puisse se le permettre…
    Cependant, je crains que la tardivité de ma réponse soit moins due à un quelconque secret à conserver tel quel qu’à deux raisons bien plus plates : 1 – Je suis accaparé par la fin de trimestre, qui est l’occasion tant espérée de corriger encore plus de copies que d’habitude, de remplir des bulletins, de faire des conseils de classe, enfin, tout ce qui fait le charme de ce boulot 2 – J’ai besoin de réfléchir avant de répondre, ne faisant malheureusement pas partie de ceux qui ont les réponses à ce genre de questions. Je doute d’ailleurs qu’une quelconque réponse existe. Je pourrais effectivement répondre en décrivant la manière dont j’ai finalement choisi de vivre ces choses, mais je ne pense pas que cela constitue une quelconque réponse, ni un quelconque conseil, quelle que soit la manière dont, moi-même, je puisse vivre. Alors, il n’y aura pas de dévoilement de « sale petit secret », simplement parce que je n’en ai pas envie, et que je n’ai pas tendance à répondre à ce genre de question en investissant ma vie personnelle dans la réponse. Ce ne sont là que des trajectoires, des itinéraires, dont j’imaginerais mal qu’ils puissent être universalisés, et ce d’autant moins que les tentatives de persuasion, sur ce terrain ont, quand même, la plupart du temps comme objectif la simple séduction.
    Pour la définition du blog, c’est en partie bien vu, à ceci près que, finalement, peut être bien que le blog n’est qu’un piège, un appât qui dévoile finalement plus ceux qui s’y rendent que celui qui les écrit. Peut être, simplement, que celui ci essaie de ne pas trop jouer avec cette caractéristique, et qu’il essaie d’être moins un piège qu’un phare, dont la lumière n’est aucune vérité particulière, mais seulement de quoi éclairer un peu, par intermittences, les environs, juste un signe permettant le ralliement de quelques uns. Et je ne crois pas faire trop trop partie des naufrageurs de navires. Enfin, j’espère.
    Pour le moment, donc, pas de réponse. Et à mon avis, il n’y en aura pas qui soit véritablement synthétique. Lulu est confronté à un dilemne, et je ne crois pas qu’il y ait, où que ce soit dans le monde, un autre phare que celui dont il est déjà pourvu qui puisse lui tracer sa route. Jkrsb, Socrate, Diogène, jean Guitton, Saint Jean, Barthes ou les autres s’orientent comme ils peuvent dans leurs propres itinéraires, Lulu saura bien tracer le sien, je ne m’inquiète pas. Au mieux peut-on témoigner et parfois partager. Mais il y a des lieux et des moments pour cela, et tout ne se dit effectivement pas ici même. Mais j’y réfléchis, et j’y reviendrai.

  22. D’un tout petit peu haut ? A vrai dire, je n’avais guère le choix. mes connaissances en philosophie sont très rudimentaires. Kant, ce n’était pas possible, je suis raisonnable, j’auras bien voulu pourtant. Althusser, j’aurais pu, mais même en balançant des rafales d’appareils idéologiques d’état, je ne suis pas certain que j’aurais atteint mon but. Restait Platon, le plus facile stylistiquement et celui qui permet le plus d’effet à partir d’une connaissance rudimentaire. Eh non, le jkrsb se trompe, je ne l’ai pas pris d’un peu haut, je l’ai joué facile au contraire.

  23. Ah ben moi je l’ai trouvé plutôt classieux, cet exercice de style ! Et j’avais un peu l’impression que tu regardais l’échange de l’extérieur, en te disant « hmmm hmmmmmm… voyons comment le jkrsb va se sortir de l’exercice » 🙂
    Bon, faire intervenir Althusser sur la question amoureuse, c’était prendre le risque que l’échange finisse dans la rubrique faits divers, et Kant, je crains que ça soit difficile de le faire intervenir sur la question. Platon, ça reste le choix le meilleur en la matière. Mais je voulais pas dire que tu avais frimé (ou alors, à ce compte là, je frime en permanence ! (c’est pas tout à fait impossible, ça)), juste que tu semblais en poste d’observation, rien de plus !
    Cela dit, je travaille la question. Et j’ai voulu lire Barthes, je suis donc allé à la Fnac… et je ne l’ai point trouvé ! 😀 Mais je ne me déclare pas battu pour autant !

    NB : si mes eleves avaient une connaissance rudimentaire de Platon qui leur permette d’écrire de telles parodies, je pense que je serais un prof un peu plus comblé !

  24. Bonsoir bonsoir !

    En ce qui me concerne, j’ai eu l’occasion de tenir entre mes mains le livre de RB (l’édition de 1977, la vôtre), elle ne se trouvait non pas à la fnac bordeaux mais à la bibliothèque (richement dotée !) de ma faculté. Je n’en ai pas encore entamé la lecture, pour cette raison que mes études m’accaparent et m’ordonnent de lire des livres qui ne sont pas spécifiquement ceux auxquels j’aimerai m’intéresser en période normal.

    Arf ! mais je vais devoir diviser ce commentaire en deux morceaux et le continuer un peu plus tard: la salle informatique dans laquelle je me trouve ferme ses portes, je reviens !

  25. Pour ma part également j’ai trouvé très bien cet exercice de style, on y reconnait immédiatement un dialogue du type platonicien 🙂 en revanche je n’en veux aucunement (heureusement ! qu’est-ce que ça voudrait dire sinon ?!) à jkrsb de ne m’avoir encore fournit de « réponse » (dont on voit apparemment qu’il n’en est pas vraiment, et c’est peut être tant mieux que les choses ne soient jamais aussi simples qu’elles puissent être évidentes) et je n’en suis pas étonné, dans la mesure où je m’accorde à dire que tout ne peut pas être dit ici. Il y a, pour ces affaires, comme vous dîtes (si je vous ai bien compris), un « prytanée », sans doute plus propice au partage (dans lequel il me tarde de pouvoir rentrer pour en discuter enfin, sans se borner à des questions de séduction).

    Si tu travailles à la question youri (d’ailleurs j’en suis touché, que tu aies fais un peu tienne ma problématique), je vais en faire autant de mon côté (ce que j’ai déjà un peu fait, notamment grâce à toi, et bien que je sois, de toute manière, obligé de faire un peu tout le temps en ce moment). Sur la question des phares, il est vrai que l’on ne peut faire en sorte que celui d’un autre vienne à remplacer le nôtre (cela n’est pas souhaitable et nous serions encore plus perdus dans ce cas !), par contre, s’il est possible d’imaginer des phares mobiles qui se rencontrent parfois et peuvent alors échanger quelque carburant ou dresser encore l’espace d’un instant leurs faisceaux lumineux conjointement vers une même direction, alors en repartant notre luminosité serait, je pense, plus grande, je veux dire enrichie d’une part de la lumière qu’aura pu nous aidé à délivrer celui rencontré. Ton blog est moins à mes yeux un piège à phares naïfs qu’un lieu où il nous est possible de venir s’alimenter, un point de passage et, comme tu disais, de ralliement (bien que la caractéristique du piège est valable aussi, mais au fond ce n’est pas ça qui a de l’importance).

    Enfin, Jean Guitton, c’est pas un type que j’apprécie 🙂 même si je sais que vous vous amusez bien à me chambrer avec ça (j’avais justement commencé à lire, il y a quelques temps déjà, le livre avec les jumeaux (« Dieu et la science », quelque chose comme ça) et je n’ai jamais pu le terminer tellement certains passages m’hérissaient les poils) donc je pense que je serai resté un petit peu à me coller à la définition de la marmite (il faut toujours être patient, et même si ça paraît impersonnel, au fond, je pense que ça ne l’est pas du tout: celui qui côtoyait socrate et conversait avec lui n’était il pas en contact avec ce que socrate avait de plus profond en lui (de plus socrate ais-je envie de dire, même si ça peut n’avoir aucun sens, ou un peu plus au contraire) ? je ne vais pas plus loin parce que je retomberai dans le piège du blog 🙂 au revoir !

  26. Bonsoir,

    j’ai depuis lu quelques extraits de l’ouvrage de RB, et je m’étonne en effet que tous ceux à qui vous avez pu le prêter vous l’aient rendu, si tant est que le capter et le garder pour soi au lieu de vous rendre votre bien ait été signe ou critère de la qualité de ce livre et de ses articles. Je vais faire mieux cette fois que de le lire à l’improviste, je vais mobiliser mon maigre pécule d’étudiant pour en faire aussitôt l’achat.

    PS: je viens également d’avoir sous la main Et si je suis désespéré, que voulez-vous que j’y fasse ?, je m’en retourne le lire dès maintenant 🙂

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